Calais, jungle fascinante

Passionné par l’humanitaire, Stanislas Verjus - ou Stan, même pour les non-intimes - partage ses expériences à travers la photographie. A 19 ans, alors qu'il est étudiant en journalisme, il prend la route pour Calais et raconte l’évacuation de la jungle en images.

Des refugié-e-s courant devant les habitations de la jungle en feu. ©Stan Vrj

« Octobre 2016. Je pars avec Arthur et Enzo, deux gars en dernière année dans mon école. On prend la route direction Calais, pour couvrir l’évacuation de la jungle. C’est marrant. On ne se connait pas mais sur place, on dort ensemble dans la voiture d’Enzo. Baptisée la « mojo-mobile » parce qu’on y tourne des lives Facebook. A l’époque, je bosse pour une agence en tant que photo-reporter. Elle me file trois accréditations. Étrange d’ailleurs, d’avoir besoin d’accreds pour couvrir une évacuation policière. Pour voir des gens se faire dégager de chez eux. Je déambule beaucoup dans la jungle. Mais le jour-j, les CRS bloquent le passage. Il fait beau, pas chaud. Je porte le même jean et la même polaire noire depuis trois jours. Et mes protections : veste de moto, casque et lunettes de piscine. Une odeur permanente de plastique brûlé rend l’air irrespirable. La jungle est envahie d’une énorme fumée noire. Au loin, les sirènes des pompiers n'arrêtent pas de siffler. La panique s'installe et tout le monde court dans tous les sens. C’est un autre univers. Je ressens énormément de compassion pour les réfugiés. De la compassion mais pas de tristesse. Être derrière l’appareil me permet de garder de la distance avec mes émotions. Et là, c’est tellement violent que ça en devient fascinant. Très dur aussi. Et le fait que la presse soit là rend le truc encore plus glauque. Socialement par contre, ça m’ouvre vraiment l’esprit. Les gens sont conscients de leur situation, malgré tout heureux d’être là. Heureux d’avoir échappé au pire chez eux. »

Des refugié-e-s pénètrent la zone portuaire de Calais. ©Stan Vrj

Louise Pointu d'Imbleval