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Dépistage Covid-19 : l'insoutenable attente du résultat

  • Photo du rédacteur: Ségo
    Ségo
  • 4 mars 2021
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 6 mars 2021


9 JANVIER 2020 : DÉCOUVERTE D’UN NOUVEAU CORONAVIRUS (SARS-COV-2). CE NOUVEAU VIRUS EST RESPONSABLE D'UNE MALADIE INFECTIEUSE RESPIRATOIRE APPELÉE COVID-19. Photo de WIX.


REPORTAGE. En pleine crise sanitaire, je débute le mois de mars 2021 par un isolement dans mon studio parisien. Je me soumets à l'épreuve de l'écouvillon dans le nez. Mais mon calvaire ne s'arrête pas là : mon sort dépend de l'issue du test.


Lundi 1er mars, je vis dans l'incertitude. La suspicion de Covid-19 est une expérience inévitable en pleine pandémie. Cette frayeur a débuté dans la nuit du dernier jour de février. 2h du matin. Une fièvre élevée. Courbatures. Maux de tête. J’ai l’impression d’être dans un mauvais film. Retour à la réalité. En fond sonore j'entends l'appel du président de la République : tenir encore « quatre à six semaines. » Cette requête d’Emmanuel Macron sonne en moi comme une menace. 13h30. Téléconsultation de dix minutes. Le médecin ne s’attarde pas. Deux jours d’arrêt de travail. Je ne peux éviter le test PCR, une des armes anti-Covid. Huitième test, je suis rôdée. Rue de l’Université, dans le septième arrondissement de Paris, je me traîne jusqu'à un laboratoire étrangement dépeuplé. Apeurée, je fais face à un laborantin déterminé. Il enfonce mécaniquement un petit écouvillon d’une quinzaine de centimètres, dans mes narines. Mes fosses nasales accusent le coup.


Vers une psychose inévitable

Mardi 2 mars 2021. 12 heures. Affalée sur mon matelas vieillot et déformé de 80cm sur 190cm, cheveux en bataille, je contemple avec indifférence le faux-plafond blanchâtre de mon studio parisien. Prisonnière de mon 18 m2, je consulte sur mon téléphone les derniers chiffres des cas recensés du coronavirus : 22 857 cas supplémentaires ont été détectés ces dernières 24 heures. Suis-je désormais une « pestiférée », une bombe à retardement ?


Je me morfonds sous ma couette en plumes, les pieds froids, le corps raide. Les céphalées de la veille m’ont siphonnée de toute force physique. Les cachets de doliprane ont été ma planche de salut. Des photos de famille aux couleurs pâles, placardées, sur mon papier peint blanc, font fuir mes larmes. De l'étagère blanche, au dessus du radiateur, provient le parfum méditerranéen d’une jacinthe rose. Cette senteur me transporte quelques secondes dans de lointaines contrées. Mais, après avoir consulté l’actualité du jour, mon esprit s’obscurcit.


Entre culpabilité et colère, je ressasse ces mois interminables de difficultés. Je m'enfonce dans la tergiversation. Suis-je faite pour le journalisme ? Mon cœur s’emballe. Ma vie personnelle est un néant. J’ai des frissons. Mon esprit tourbillonne puis retour à la réalité. 14h30. J’attends avec impatience le résultat de mon test nasopharyngé de dépistage du coronavirus, tout en redoutant qu’il soit positif. Je réactualise avec agacement ma boite e-mail, toutes les dix minutes. L’angoisse me tenaille, la solitude me pèse. La chair de poule parcourt tout mon corps. Je saisis un flacon d’huile essentielle de lavande fine, pour me détendre. Je le respire frénétiquement. Rien n’y fait : je sombre dans la mélancolie. La pandémie a été une avalanche qui a balayé mes convictions, mes envies, mes aspirations. Mes yeux cernés se portent sur l’extérieur.


Des échafaudages barrent la vue d'une fenêtre au 2e étage du 155 rue de Grenelle, 75007 Paris. Photo Ségo.


Du deuxième étage, je constate que la vie continue. Les deux seules fenêtres décrépies de mon minuscule appartement disparaissent progressivement sous la poussière. Elles donnent une impression de saleté. Mal isolées, je suis en permanence confrontée aux bruits de la rue. L'inutilité de mes vitres est désespérante. Le bruit assourdissant des travaux dans mon immeuble me fait sursauter. Les ouvriers travaillent sans répit. La lumière a disparu derrière des échafaudages qui recouvrent toute la façade de cet immeuble des années 1930. Mes volets sont condamnés. Dans la rue, les klaxons des automobiles semblent ne jamais s’arrêter. Le bruit fracassant des moteurs des deux-roues m’horripile. L’attente devient insupportable.


"Suis-je dans le « monde d’après ? » "

15h05. Le résultat du laboratoire tombe. Je me mords la lèvre jusqu’au sang et je m’agite sur mon tabouret. J’entre fébrilement le 02061995 sur mon ordinateur. Mon cœur bat à la chamade. Ouf ! «NÉGATIF». Mes membres se détendent, je pousse un soupir de soulagement. Je suis passée entre les mailles du virus. Spontanément, j’enfile mon manteau gris favori et me rends au Champs-de-Mars, à deux pas de mon petit studio.

Paris, 7e arrondissement, Champs-de-Mars. Photo Ségo.


Assise sur un banc, je respire l’air parisien, frais, assaisonné aux pots d'échappement. Des dizaines d’enfants courent dans tous les sens, sans tenir compte des gestes barrières. Leur insouciance, leurs cris, leurs rires me mettent du baume au cœur. Une odeur florale de printemps flotte dans l’air. Suis-je dans le «monde d’après ?» Non, le coronavirus n’est jamais loin. Les masques mal positionnés des passants retiennent mon attention. Je reste sur mes gardes. Le couvre-feu approche. Mes 18m2 cafardeux seront mon dernier combat.


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Proposition de vidéo : Reportage dans les coulisses du test PCR., du laboratoire Eurofins Biomnis. Sa plateforme Covid dédiée, 1000 m2 d’espaces de laboratoires alloués aux tests SARS-CoV-2 fonctionnant 7J/7 et 24h/24 pour traiter environ 25 000 tests RT-PCR SARS-CoV-2/jour. Interview des équipes impliquées sans relâche contre l’épidémie Covid depuis un an.




 
 
 

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