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  • Louis Bolla

Librairie Lady Long Solo : sanctuaire du CBD et bastion de la légalisation du cannabis

Dernière mise à jour : 4 mars 2021

REPORTAGE. A Paris, la librairie Lady Long Solo bénéficie du flou juridique pour vendre des produits à base de CBD. Militante en faveur de la légalisation du cannabis, elle abrite aussi bien d’autres curiosités. Lieu de rencontres, siège de beaucoup de mouvements militants, elle mène un combat politique en faveur des droits humains et des libertés.


A l’intérieur de la librairie, les produits au CBD et les livres cohabitent sur l'étagère du fond. ©Louis BOLLA
  • La librairie Lady Long Solo a été fondée en 1995 par le journaliste et éditeur Michel Sitbon.

  • Le flou juridique autour du cannabinoïde (CBD) tolère la vente des produits alimentaires et bien-être.

  • La mission d'information sur la réglementation et l’impact des différents usages du cannabis a démarré en janvier 2020 et s'est conclue le 28 février 2021.


« Ici, c’est l’Ambassade des libertés ». Derrière le comptoir de la librairie Lady Long Solo dans le XI arrondissement de Paris, Farid Ghehioueche, bénévole de 49 ans, pointe avec son index les infusions au cannabidiol (CBD). Les goûts sont multiples : orange sanguine, piña colada ou pêche. Et c’est bien là, la spécificité de la librairie, fondée en 1995 par le journaliste et éditeur Michel Sitbon. Elle vend toutes sortes de produits à base de CBD, du cannabis sans sa substance psychotrope (0,2% maximum de THC). Sucettes, chewings-gums, grinders (objet servant à déchiqueter la fleur de cannabis) fabriqués avec du chanvre, et même des fleurs séchées pour les fumeurs, sont mis en valeur sur le comptoir. Ce jour-là, Iris, bénévole et étudiante en photographie, et François, un habitué, traînent dans la boutique. L’odeur de tabac embaume la pièce et les paquets à expédier s'empilent sur le bureau.


« On a été un peu contraints de revoir notre formule, car les livres ne se vendent pas trop », confie Farid. Depuis l’ouverture de la librairie en 1995, le cannabis est omniprésent dans les écrits qui jonchent la librairie aux côtés des Victor Hugo ou Nietzsche, alors la vente de CBD n’est qu’un prolongement de ce militantisme.


En France, la législation concernant la vente de ces produits reste dans un flou juridique depuis 2018 et les premières ouvertures de boutiques. Le 19 novembre 2020, la Cour de Justice Européenne a publié un arrêté jugeant les lois françaises illégales concernant la commercialisation des produits CBD. Alors ce qui n’est pas interdit est-il autorisé ?

A l'entrée de la rue Keller, Farid téléphone à la boutique Legalize pour prévenir de notre arrivée. © Louis Bolla

Joint à la main, Farid, aussi président du collectif Cannabis Sans Frontières, commente l'actualité. Une mission d'information sur la réglementation et les usages du cannabis s'est clôturée sur une consultation citoyenne dimanche 28 février à l'Assemblée nationale. « J'espère que vous avez répondu au questionnaire » dit-il sérieusement. Lui oui. Résultat : 80% des 253 193 personnes ayant répondu sont favorables à la légalisation du cannabis.


A quelques rues d’ici se trouve « l'extension de la librairie ». Spécialisée en chanvre et CBD, la boutique Legalize appartient au fils de Michel Sitbon et approvisionne les étagères de Lady Long Solo en CBD. En bon guide, Farid nous y emmène. Un comptoir sur roulette bloque l’entrée aux clients, Covid-19 oblige. La marchandise à peine arrivée, l’intérieur est en désordre. Il faut déballer, peser, découper et mettre en pot. La vieille enseigne « Big Bang » en graffiti a été accrochée au fond du magasin. Dans l’arrière boutique, Joseph Sitbon commence son hachis parmentier en guise de déjeuner. Soudain, dans la pièce déjà étroite pour trois, un quatrième personnage débarque. « Farid, tu as reçu mon sms ? Je cherche des agriculteurs de chanvre pour un projet de réhabilitation de terres agricoles polluées en Ile-de-France, tu connais pas des gars ? » Rapidement, le cannabis prend des allures de politique.


« Farid, tu as reçu mon sms ? Je cherche des agriculteurs de chanvre pour un projet de réhabilitation de terres agricoles polluées en Ile-de-France, tu connais pas des gars ? »

La devanture de la librairie Lady Long Solo où trône au milieu des livres un plant de cannabis. @ Louis BOLLA

Un lieu de rencontres et d’information


La première cliente de l’après-midi vêtue d’une robe aux imprimés à fleurs pénètre dans la librairie pour acheter une infusion. Elle porte des sandales et « cherche quelque chose pour dormir ». Iris lui présente les infusions et la rassure : « Cela va simplement vous détendre. » Vendu.

Au 38 rue Keller, il y a certes du CBD, mais pas qu'uniquement. « C’est un lieu d’émulation où les projets et les idées se rencontrent » déclare Farid. Une étagère est dédiée aux livres sur le génocide rwandais, une autre sur les guides de la « ganja » et le reste est consacré aux livres des Editions Dagorno et des Editions du Lézard qui ont vu naître cette librairie.


Il en est passé aussi des écrivains, militants, réfugiés, journalistes et auteurs. Farid se souvient. Il y a trois ou quatre ans, la librairie a hébergé 18 réfugiés d’Asie centrale dans son local pendant plusieurs jours. Et il en passera encore. C'est ainsi qu'a été initié une partie du mouvement Nuit debout, comme l'association de cyberjournalistes ou le collectif Cannabis Sans Frontières. Il y a une certaine convergence des luttes dans cette Ambassade. Reste à savoir si elle pourra délivrer un passeport diplomatique.



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Titre print : Lady Long Solo, la librairie joint lecture et cannabis

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